mardi 1 novembre 2016

Je suis un clown triste


Partout des visages pâles, des sourires tristes, des cernes, des bâillements. Sans arrêt des baisses de motivation, des coups de blues, des gestes de colère et d'énervement. Des cries, des pleurs : cachés. Des larmes, des coupures : camouflés. Des trop plein d'émotions sans cesse refoulés. Des rejets, des hurlements comme réponses.

- Ça va ?

Une mine inquiète, un sourire rassurant l'espace d'un instant. De toute manière la personne en face ne peut qu'aller bien, parce que dans ce monde personne n'a le droit d'être triste, personne n'a le droit de lâcher l'affaire. Parce qu'on est arrivé à un stade où se mutiler est moins remarqué que la prise de poids, où se suicider est considéré comme de la lâcheté plutôt que le rejet d'une trop grande cruauté pour une trop belle âme.

- Je suis fatigué.

Et le visage repart de là où il était venu et tu peux te renfermer dans ta tristesse tranquillement, sans personne pour te déranger, songer à tes idées noires et sombrer un peu plus dedans sous les yeux de tous mais pourtant de manière totalement invisible. Tous les soirs, tu pleures, tu cries, tu frappes ton oreiller, tu te mords et te roule en boule. Toutes les nuits tu songes à ta journée passée les yeux fixés sur le plafond à chercher un sommeil réparateur qui n'arrivera jamais. Caché, enfin, tu laisse sortir le flot d'eau continu qui cherchait depuis le jour à sortir de tes yeux. Pourtant, t'es pas mieux ensuite, non. T'en ressors juste tout tremblotant, cherchant de l'affection que tu ne trouveras pas. Mais pleurer ça fatigue alors au moins tes yeux se ferment et tu t'endors. Et quand tu te réveille c'est reparti pour un tour, pour une nouvelle journée. Mais souris, merde, sois fort !

...........................................................

Ici, on a pas le droit d'être triste, non. Parce que pleurer est un signe de faiblesse, parce que pleurer c'est avouer que ça va tellement pas que tu ne contrôle plus quand ça sort. Parce qu'être triste, c'est ne pas réussir à contrôler sa vie, à gérer ses émotions, c'est ne pas réussir à avancer. Parce que pleurer sous la pression, sous le stress, sous la colère, sous la honte ou sous la peur, c'est pleurer pour rien. Parce que pleurer s'est accepté à condition d'être à un enterrement. Mais t'sais t'as le droit de pleurer, t'as le droit d'avoir peur. T'as le droit de stresser, d'être en manque ou de plus réussir à avancer. T'en as parfaitement le droit et c'est totalement con qu'on te le retire.

Ici, on a pas le droit d'être triste, mais on fait rien pour aider ceux qui le sont. Ici, quand quelqu'un se mutile, c'est de sa faute. Quand quelqu'un devient boulimique, anorexique, c'est de sa faute. Quand quelqu'un se suicide, c'est de sa faute. Ici, quand quelqu'un est triste personne ne vient l'aider, et quand il cherche à en parler personne ne veut l'écouter. Pourtant, après, tout le monde est assez hypocrites pour dire avec un visage d'ange "Mais enfin, il fallait venir en parler, on l'aurait aidé nous !". Mais ferme ta gueule la société, ferme-la putain ! 

1 commentaire: