samedi 16 mai 2015

Comme un enfant

La candeur


<< https://www.youtube.com/watch?v=jwXozO-qKPI >>

Comme un enfant je prends mon doudou. Bouboule. Une espèce d'énorme boule de poils tout doux, avec deux petites oreilles et un joli museau, le tout qui forme une bouille toute mignonne. Je le prends et je le serre très fort tout contre moi. La tête à moitié enfouie sous sa masse, je fixe le vide. Il fait nuit, il fait tard. Dehors, le hululement d'une chouette vient parfois briser le silence qui s'est installé. La maison craque de mille et un bruits, ces bruits qui te faisaient frémir quand, enfant, tu te réveillais en pleine nuit. Seulement, cette fois, je ne dors pas. Je n'ai pas sommeil. Le regard plongé dans des rêves invisibles, je cherche. Qu'est-ce que je cherche ? Quelque chose. Je cherche ce que je dois chercher parce que dans ce cache-cache, un des deux joueurs ne sait pas à qui il a affaire. C'est fou comme dans les moments de doutes tu as tendance à retourner à tes vieilles habitudes. Seulement voilà, ce n'est plus comme avant. Je n'ai pas juste à appeler ma mère pour que tout s'arrange, pas cette fois. Je pourrais toujours lui dire que cela ne changerait rien au fait. La vie passe son cours, les mois défilent, les heures de cours me passent devant le nez sans que je puisse les fixer attentivement et mes dernières minutes de tranquillité filent entre mes doigts sans que rien ne puisse y changer quelque chose. Bientôt, le mot "Fin" apparaîtra sur toutes les lèvres et pour tout le monde il aura une signification différente. Certains se sentiront léger, d'autres seront empli d'un sentiment de plénitude complet. Et puis il y aura ceux qui pleureront à ces personnes qu'ils perdront à l'instant même où la cloche sonnera pour la dernière fois avant deux mois. Il y aura des embrassades, plein de câlins à l'horizon. Des larmes, sans aucun doute. Des numéros de téléphone échangés à la va-vite, peut-être, et même certaines personnes qui partiront sans rien dire, en silence, comme à leur habitude. Mais si vous cherchez bien, vous verrez, parmi tout ce brouhaha, des jeunes qui partent à la découverte, empli de l'amour de leurs proches. Ils ne se rendront peut-être pas compte de ce qu'ils gagnent, mais ils auront pleinement conscience de ce qu'ils perdent. La sûreté d'une classe déjà faite, d'un bâtiment grand mais pourtant mémorisé jusqu'à ces moindres recoins, de professeurs connus et de surveillants qui les ont vu grandir. 

Comme un enfant je sens mon cœur se serrer pendant que je réalise qu'effectivement, je sais ce que je perds. Je le sais trop bien, et qu'est-ce que ça fait mal putain. Je me rappelle, l'an dernier, le soulagement que j'avais ressenti en sachant qu'il me restait une année pour me préparer mentalement à dire adieux aux autres. J'avais souri, j'avais même ris avec ma classe. Pourtant, quand on avait dû se séparer pour deux mois, des larmes m'étaient venus, couvrant ma vision d'une enveloppe floutée. J'avais vu le monde en double l'espace de quelques instants, puis j'avais refermé les paupières, m'étais secouée et les avais rouvertes, de nouveau souriante. Et cette année, alors, comment tout serait ? Différent. Qui aura l'honneur de voir le premier de l'eau jaillir de mes yeux ? peut-être même personne, qui sait. J'attendrais peut-être le soir, la nuit venue, pour prendre Bouboule. Avant, quand j'étais trop triste, je prenais doudou lapin et je lui mordais les oreilles. Je ne comprends même pas comment elles ont faites pour tenir et ne pas s'arracher. Maintenant, doudou lapin est aux pieds de mon lit et je préfère attraper Bouboule. Le serrer très fort, tout contre moi, pour expulser ce trop plein d'émotions en faisant jouer mes muscles. Ce qui n'a pas changé, c'est que j'ai encore besoin d'eux. Mes doudous. Trop grande pour les utiliser encore ? Peut-être, et alors ? Vous préféreriez que je m'exprime ? Mais pour dire quoi ? Que ma vie actuelle me manquera ? Mais vous le savez déjà.

+ Parce qu'un enfant, c'est aussi bien toi que moi ♫

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